ZAO WOU-KI, Growing & Nous deux
ZAO Wou-Ki (1920-2013)
Growing
1956
huile sur toile
54 x 65 cm
Le Havre, musée d'art moderne André Malraux, achat de la Ville, 1956
© 2005 MuMa Le Havre / Florian Kleinefenn © ADAGP, Paris 2020
Growing
1956
huile sur toile
54 x 65 cm
Le Havre, musée d'art moderne André Malraux, achat de la Ville, 1956
© 2005 MuMa Le Havre / Florian Kleinefenn © ADAGP, Paris 2020
ZAO Wou-Ki (1920-2013)
Nous deux
1955
huile sur toile
38 x 46 cm
Le Havre, musée d'art moderne André Malraux, achat de la Ville, 1956
© 2005 MuMa Le Havre / Florian Kleinefenn © ADAGP, Paris 2020
Nous deux
1955
huile sur toile
38 x 46 cm
Le Havre, musée d'art moderne André Malraux, achat de la Ville, 1956
© 2005 MuMa Le Havre / Florian Kleinefenn © ADAGP, Paris 2020
Zao Wou-Ki est né à Pékin le 1er février 1920. Il est l’ainé d’une fratrie de sept enfants. Son père était banquier. Dès son plus jeune âge il s’intéresse à la peinture mais aussi à la musique et à la poésie. Son grand-père, amateur de calligraphie, lui enseigne cet art ancestral. En 1935, le jeune homme entre à l’École des Beaux-Arts de Hangzhou où il étudie le dessin, la calligraphie et la peinture traditionnelle. Il commence à peindre à l’huile dès sa première année d’études. Il réalise sa première exposition personnelle en 1941 à Chongquing. Il y présente des œuvres figuratives, des portraits, des natures mortes et des paysages. L’année suivante, il organise une exposition au musée national d’histoire naturelle dans laquelle sont présentés des artistes avant-gardistes qui souhaitent rompre avec la tradition. En 1947, Zao Wou-Ki décide de partir à Paris pour approfondir son apprentissage et tenter de libérer son art de la tradition. Il s’installe à Paris dans un petit atelier, dans le quartier de Montparnasse, où il a pour voisin Alberto Giacometti. Il fréquente l’Académie de la Grande Chaumière, visite musées et galeries. En 1949, il expose ses œuvres, trente-six au total, à la galerie Creuze. La préface du catalogue est confiée à Bernard Dorival. La même année, il participe également au Salon d’Automne et au Salon des Tuileries.
Zao Wou-Ki découvre par ailleurs la lithographie chez l’imprimeur Desjobert. Il expose ses huit premières lithographies l’année suivante à la librairie-galerie La Hune. Il y fait la rencontre de Gildo Caputo et Myriam Prévot. Ses lithographies sont accompagnées de huit poèmes d’Henri Michaux avec lequel l’artiste deviendra proche par la suite. L’année 1950 est également marquée par sa première participation au Salon de Mai où il expose sa toile 20.12.49 – Paysage jaune acquise par l’État et aujourd’hui conservée au musée national d’art moderne.
En 1951, Zao Wou-Ki visite le musée de Berne où il fait la découverte – fondamentale – de la peinture de Paul Klee. Il emprunte progressivement la voie de la peinture occidentale. Son œuvre s’écarte de plus en plus de la réalité pour se rapprocher des formes abstraites. Il peint encore dans de petits formats. Pierre Loeb visite au mois de janvier l’atelier de l’artiste et fait l’acquisition de onze toiles. Il devient ainsi son marchand jusqu’en 1957, date à partir de laquelle Zao Wou-Ki est représenté par la Galerie de France. Il rencontre, par l’intermédiaire d’Henri Michaux, le compositeur Varèse avec qui il se lie d’amitié. La musique fait en effet partie intégrante de sa vie et de son œuvre.
Les années 1953 et 1954 sont marquées par un changement qui s’opère dans son œuvre peint. L’artiste s’oriente vers l’abstraction lyrique. Ce passage à l’abstraction « libère ses compositions[1]. » Il a recours aux signes, à la manière de Paul Klee. Pourtant, sa peinture n’est pas totalement déconnectée ni du réel, ni de ses origines. L’espace de ses compositions demeure construit. Gildo Caputo et Myriam Prévot, à la tête de la Galerie de France, lui proposent de rejoindre leur galerie. L’artiste accepte et présente sa première exposition l’année suivante, en 1957. Cette exposition montre la presque totalité de ses œuvres abstraites.
En 1956 – alors que le musée du Havre n’est pas encore sorti de terre – Reynold Arnould, le nouveau conservateur, achète directement auprès de l’artiste Zao Wou-Ki deux huiles pour le musée du Havre : Nous deux et Growing. Exécutée en 1955, Nous deux puise ses sources dans le poème Nous deux encore écrit par Henri Michaux suite au décès de son épouse en 1948. Particulièrement abstraite, cette œuvre représente deux être qui se détachent sur le côté droit et le côté gauche de la toile. En 1957, ce thème est repris par l’artiste à la suite de sa séparation avec son épouse Xie Jinglan[2]. L’œuvre porte le même titre que le poème écrit par Michaux neuf ans auparavant. L’artiste évoque la douleur de la séparation à travers cette toile. Comme l’écrivait en 1948 son ami poète :
« Air du feu, tu n’as pas su jouer.
Tu as jeté sur ma maison une toile noire. Qu’est-ce que cet opaque partout ? C’est l’opaque qui a bouché mon ciel. Qu’est-ce que ce silence partout ? C’est le silence qui a fait taire mon chant.
L’espoir, il m’eût suffi d’un ruisselet. Mais tu as tout pris. Le son qui vibre m’a été retiré[3]. »
Il est probable que Reynold Arnould et Zao Wou-Ki se soient rencontrés par l’intermédiaire de la librairie La Hune ou de la Galerie de France. Les deux artistes fréquentaient les mêmes réseaux, ce qui a pu faciliter leurs échanges. Ces deux achats viennent par ailleurs illustrer la volonté de Reynold Arnould de voir entrer l’art abstrait dans les collections du musée du Havre. Preuve de l’importance qu’il accordait à ces deux œuvres, elles sont toutes les deux présentées lors de l’accrochage mis en place pour l’inauguration du Musée-maison de la culture du Havre en 1961[4].
[1] HENDGEN Yann, « Peindre au-delà des limites » in. Zao Wou-Ki : l’espace est silence, exposition, Paris, musée d’art moderne de la Ville de Paris, du 1er juin 2018 au 6 janvier 2019, p. 35.
[2] MICHAUD François « Abstraction de toute lourdeur » in. Zao Wou-Ki : l’espace est silence, exposition, Paris, musée d’art moderne de la Ville de Paris, du 1er juin 2018 au 6 janvier 2019, p. 24.
[3] MICHAUX Henri, « Nous deux encore » in. La Vie dans les plis, Paris, Gallimard, 1948.
[4] ARNOULD Reynold, Catalogue des œuvres appartenant aux collections de la Ville du Havre présentées à l’occasion de l’inauguration du Musée-Maison de la Culture 24 juin 1961, Le Havre, ancienne imprimerie Etaix.
Zao Wou-Ki découvre par ailleurs la lithographie chez l’imprimeur Desjobert. Il expose ses huit premières lithographies l’année suivante à la librairie-galerie La Hune. Il y fait la rencontre de Gildo Caputo et Myriam Prévot. Ses lithographies sont accompagnées de huit poèmes d’Henri Michaux avec lequel l’artiste deviendra proche par la suite. L’année 1950 est également marquée par sa première participation au Salon de Mai où il expose sa toile 20.12.49 – Paysage jaune acquise par l’État et aujourd’hui conservée au musée national d’art moderne.
En 1951, Zao Wou-Ki visite le musée de Berne où il fait la découverte – fondamentale – de la peinture de Paul Klee. Il emprunte progressivement la voie de la peinture occidentale. Son œuvre s’écarte de plus en plus de la réalité pour se rapprocher des formes abstraites. Il peint encore dans de petits formats. Pierre Loeb visite au mois de janvier l’atelier de l’artiste et fait l’acquisition de onze toiles. Il devient ainsi son marchand jusqu’en 1957, date à partir de laquelle Zao Wou-Ki est représenté par la Galerie de France. Il rencontre, par l’intermédiaire d’Henri Michaux, le compositeur Varèse avec qui il se lie d’amitié. La musique fait en effet partie intégrante de sa vie et de son œuvre.
Les années 1953 et 1954 sont marquées par un changement qui s’opère dans son œuvre peint. L’artiste s’oriente vers l’abstraction lyrique. Ce passage à l’abstraction « libère ses compositions[1]. » Il a recours aux signes, à la manière de Paul Klee. Pourtant, sa peinture n’est pas totalement déconnectée ni du réel, ni de ses origines. L’espace de ses compositions demeure construit. Gildo Caputo et Myriam Prévot, à la tête de la Galerie de France, lui proposent de rejoindre leur galerie. L’artiste accepte et présente sa première exposition l’année suivante, en 1957. Cette exposition montre la presque totalité de ses œuvres abstraites.
En 1956 – alors que le musée du Havre n’est pas encore sorti de terre – Reynold Arnould, le nouveau conservateur, achète directement auprès de l’artiste Zao Wou-Ki deux huiles pour le musée du Havre : Nous deux et Growing. Exécutée en 1955, Nous deux puise ses sources dans le poème Nous deux encore écrit par Henri Michaux suite au décès de son épouse en 1948. Particulièrement abstraite, cette œuvre représente deux être qui se détachent sur le côté droit et le côté gauche de la toile. En 1957, ce thème est repris par l’artiste à la suite de sa séparation avec son épouse Xie Jinglan[2]. L’œuvre porte le même titre que le poème écrit par Michaux neuf ans auparavant. L’artiste évoque la douleur de la séparation à travers cette toile. Comme l’écrivait en 1948 son ami poète :
« Air du feu, tu n’as pas su jouer.
Tu as jeté sur ma maison une toile noire. Qu’est-ce que cet opaque partout ? C’est l’opaque qui a bouché mon ciel. Qu’est-ce que ce silence partout ? C’est le silence qui a fait taire mon chant.
L’espoir, il m’eût suffi d’un ruisselet. Mais tu as tout pris. Le son qui vibre m’a été retiré[3]. »
Il est probable que Reynold Arnould et Zao Wou-Ki se soient rencontrés par l’intermédiaire de la librairie La Hune ou de la Galerie de France. Les deux artistes fréquentaient les mêmes réseaux, ce qui a pu faciliter leurs échanges. Ces deux achats viennent par ailleurs illustrer la volonté de Reynold Arnould de voir entrer l’art abstrait dans les collections du musée du Havre. Preuve de l’importance qu’il accordait à ces deux œuvres, elles sont toutes les deux présentées lors de l’accrochage mis en place pour l’inauguration du Musée-maison de la culture du Havre en 1961[4].
[1] HENDGEN Yann, « Peindre au-delà des limites » in. Zao Wou-Ki : l’espace est silence, exposition, Paris, musée d’art moderne de la Ville de Paris, du 1er juin 2018 au 6 janvier 2019, p. 35.
[2] MICHAUD François « Abstraction de toute lourdeur » in. Zao Wou-Ki : l’espace est silence, exposition, Paris, musée d’art moderne de la Ville de Paris, du 1er juin 2018 au 6 janvier 2019, p. 24.
[3] MICHAUX Henri, « Nous deux encore » in. La Vie dans les plis, Paris, Gallimard, 1948.
[4] ARNOULD Reynold, Catalogue des œuvres appartenant aux collections de la Ville du Havre présentées à l’occasion de l’inauguration du Musée-Maison de la Culture 24 juin 1961, Le Havre, ancienne imprimerie Etaix.
Par Claire Rançon et Clémence Poivet-Ducroix, MuMa Le Havre
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