ARNOULD, Forer 1
Reynold ARNOULD (1919-1980)
Forer 1
1956
huile sur toile
100 x 148,7 cm
Le Havre, musée d'art moderne André Malraux, achat de la Ville, 1960
© 2015 MuMa Le Havre / Charles Maslard
Forer 1
1956
huile sur toile
100 x 148,7 cm
Le Havre, musée d'art moderne André Malraux, achat de la Ville, 1960
© 2015 MuMa Le Havre / Charles Maslard
Cette huile sur toile a un statut particulier dans l’exposition Forces et rythmes de l’industrie[1] (1959) de Reynold Arnould. En effet, alors que la plupart des toiles ont été peintes en 1958-1959, elle date de 1956. Elle a été présentée à l’exposition collective Art from France qui a circulé aux Etats-Unis, successivement au Museum of Art de San Francisco, à l’Art Center de la Jolla de San Diego et au Los Angeles County Museum, de décembre 1956 à mars 1957. Les œuvres de cette exposition placée sous le patronage du gouvernement français avaient été choisies par Jean Cassou assisté de Fernand Léger et d’André Derain. Forer 1 est donc antérieur à l’élaboration du projet de l’exposition Forces et rythmes de l’industrie, puisque la première réunion des mécènes réunis par Arnould pour le montage de cette exposition n’a lieu que le 15 février 1957. Son esthétique d’ailleurs diffère assez sensiblement de celle des autres toiles. Les noirs dominent, associés à des couleurs vives en contraste. Une autre toile, conservée au musée de Besançon s’apparente à Forer 1. Intitulée Benne (Forces et rythmes de l'industrie, n°65), elle était également présentée à l’exposition Art from France sous l’intitulé Composition. Elle représente une benne de camion en déchargement et est apparentée à de nombreuses gouaches conservées au centre Pompidou, qui avait peut-être été accrochées lors de l’exposition Automobiles de 1955 au musée des arts décoratifs. Il faut compter dans la même série une grande toile intitulée Vilebrequin (Forces et rythmes de l'industrie, n°5) qui appartenait à l’ingénieur Jean Albert Grégoire et qui fait partie des œuvres déposées par l’Institut pour l’histoire de l’aluminium au musée de l’automobile de Mulhouse.
Benne, Vilebrequin et Forer 1 constituent donc les témoignages d’un moment de la démarche picturale de Reynold Arnould, comme un « chainon manquant » entre ses deux grandes expositions de 1955 et 1959. Elles manifestent un dynamisme, encore peu présent en 1955, qui domine en 1959. En 1955, Arnould s’était attaché à saisir la symbolique des carrosseries automobiles, pas leur aérodynamisme qui avait fait l’objet des recherches des futuristes italiens. On trouve pourtant certaines œuvres représentant des voitures aérodynamiques, mais, en l’absence de catalogue, il est difficile de savoir si elles ne sont pas postérieures à cette exposition. C’est en tous cas le cas des œuvres inspirées des voitures de son ami l’ingénieur Jean Albert Grégoire, qu’il rencontre à l’occasion de l’exposition de 1955. Par la gamme chromatique, comme par une certaine violence du trait, les portraits des automobiles de Grégoire sont très proches de Forer 1 et des œuvres qui lui sont apparentées. Benne et Vilebrequin sont d’ailleurs inspirées par l’univers automobile.
Une autre caractéristique de Forer 1 est que l’œuvre n’est pas clairement contextualisée à la différence de la plupart des toiles accrochées à l’exposition Forces et rythmes de l’industrie. Elle a à l’évidence une thématique minière. Mais on ne sait pas comment Reynold Arnould est entré en contact avec l’univers de la mine. Une manifestation artistico-industrielle a pu toutefois l’inspirer : l’exposition Les mines, les forges et les arts, qui s’est tenue du 16 juin au 3 juillet 1955 au musée des travaux publics, et qui a donné lieu à la publication d’un riche volume[2]. Organisée à l’occasion du centenaire de la Société de l’industrie minérale, elle était associée à un congrès scientifique et à deux autres expositions parisiennes : la présentation d’une « mine moderne 1955 reconstituée grandeur nature » sur les quais de la Seine ; celle de maquettes de mines et d’installations minières à la Maison de la chimie. L’ouvrage, qui n’est pas le catalogue de l’exposition, illustre l’activité minière depuis l’Égypte des pharaons. On y trouve des représentations photographiques : portrait d’un mineur au marteau-piqueur par John L. Craven, mais aussi picturales : paysage de Marcel Gromaire (1952), portrait d’un mineur d’Edouard Pignon (1951) et surtout une collection d’œuvres américaines qui avait été commandées en 1954 par Fortune magazine. Ce journal avait invité sept artistes à représenter le « mineur continu », machine d’extraction du charbon produite par la Joy Manufacturing Company[3].
[1] Il existe une réplique en petit format de cette œuvre dans une collection particulière.
[2] Les mines et les arts à travers les âges, édité sous les auspices de la Société de l’industrie minérale avec des textes de l’ingénieur Marcel N. Barbier, en français, en anglais et en allemand par souscription à 3000 exemplaires au total, dont les deux-tiers en français.
[3] « Seven Painters and a Machine », Fortune Magazine, n° 49, juin 1954, p. 127-132. Ces artistes sont Antonio Frasconi (1919-2013), Roberto Matta (1911-2002), Walter Tandy Murch (1907-1967), Ben Shahn (1898-1969), Saül Steinberg (1914-1999) et sa femme Hedda Sterne (1910- 2011) et Rufino Tamayo (1899-2009).
Benne, Vilebrequin et Forer 1 constituent donc les témoignages d’un moment de la démarche picturale de Reynold Arnould, comme un « chainon manquant » entre ses deux grandes expositions de 1955 et 1959. Elles manifestent un dynamisme, encore peu présent en 1955, qui domine en 1959. En 1955, Arnould s’était attaché à saisir la symbolique des carrosseries automobiles, pas leur aérodynamisme qui avait fait l’objet des recherches des futuristes italiens. On trouve pourtant certaines œuvres représentant des voitures aérodynamiques, mais, en l’absence de catalogue, il est difficile de savoir si elles ne sont pas postérieures à cette exposition. C’est en tous cas le cas des œuvres inspirées des voitures de son ami l’ingénieur Jean Albert Grégoire, qu’il rencontre à l’occasion de l’exposition de 1955. Par la gamme chromatique, comme par une certaine violence du trait, les portraits des automobiles de Grégoire sont très proches de Forer 1 et des œuvres qui lui sont apparentées. Benne et Vilebrequin sont d’ailleurs inspirées par l’univers automobile.
Une autre caractéristique de Forer 1 est que l’œuvre n’est pas clairement contextualisée à la différence de la plupart des toiles accrochées à l’exposition Forces et rythmes de l’industrie. Elle a à l’évidence une thématique minière. Mais on ne sait pas comment Reynold Arnould est entré en contact avec l’univers de la mine. Une manifestation artistico-industrielle a pu toutefois l’inspirer : l’exposition Les mines, les forges et les arts, qui s’est tenue du 16 juin au 3 juillet 1955 au musée des travaux publics, et qui a donné lieu à la publication d’un riche volume[2]. Organisée à l’occasion du centenaire de la Société de l’industrie minérale, elle était associée à un congrès scientifique et à deux autres expositions parisiennes : la présentation d’une « mine moderne 1955 reconstituée grandeur nature » sur les quais de la Seine ; celle de maquettes de mines et d’installations minières à la Maison de la chimie. L’ouvrage, qui n’est pas le catalogue de l’exposition, illustre l’activité minière depuis l’Égypte des pharaons. On y trouve des représentations photographiques : portrait d’un mineur au marteau-piqueur par John L. Craven, mais aussi picturales : paysage de Marcel Gromaire (1952), portrait d’un mineur d’Edouard Pignon (1951) et surtout une collection d’œuvres américaines qui avait été commandées en 1954 par Fortune magazine. Ce journal avait invité sept artistes à représenter le « mineur continu », machine d’extraction du charbon produite par la Joy Manufacturing Company[3].
[1] Il existe une réplique en petit format de cette œuvre dans une collection particulière.
[2] Les mines et les arts à travers les âges, édité sous les auspices de la Société de l’industrie minérale avec des textes de l’ingénieur Marcel N. Barbier, en français, en anglais et en allemand par souscription à 3000 exemplaires au total, dont les deux-tiers en français.
[3] « Seven Painters and a Machine », Fortune Magazine, n° 49, juin 1954, p. 127-132. Ces artistes sont Antonio Frasconi (1919-2013), Roberto Matta (1911-2002), Walter Tandy Murch (1907-1967), Ben Shahn (1898-1969), Saül Steinberg (1914-1999) et sa femme Hedda Sterne (1910- 2011) et Rufino Tamayo (1899-2009).
Notice établie par François Vatin, auteur avec Gwenaële Rot de l'ouvrage Reynold Arnould. Une poétique de l'industrie, Paris, Presses universitaires de Nanterre, 2019
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